Tim Burton ! Ce simple nom suffit à rameuter un grand nombre de spectateurs dans les salles obscures. Associez-y les noms de Johnny Depp et Helena Bonham Carter et vous serez alors en présence d'un pur produit Burtonien ! Après l'immense succès de son adaptation du roman de Lewis Caroll (Alice au pays des merveilles) dépassant le milliard de dollars de recettes au box-office mondial, c'est tout naturellement que Tim Burton s'engagea dans la réalisation de Dark Shadows, adapté d'une série télévisée populaire des années 1970, dont les ambitions commerciales étaient assez élevées (150 millions de dollars de budget). Qu'en est-il du résultat ?
Au XVIIIème siècle, le riche industriel Barnabas Collins multiplie les conquêtes féminines mais son amour se porte un jour sur Josette. Angélique Bouchard, une de ses servantes et amante, follement amoureuse de lui, voit alors ses avances rejetées. Ce que Barnabas ne sait pas, c'est qu'Angelique est une sorcière et qu'elle est aussi particulièrement rancunière ! Elle provoque un accident qui tue ses parents et pousse sa bien aimée Josette au suicide. Effondré, Barnabas se jette du haut de la falaise mais échappe à la mort du fait de sa nouvelle nature, Angélique l'a transformée en vampire. Elle monte alors les villageois contre lui qui l'enterrent vivant et le condamne à une éternité de souffrance. En 1972, des ouvriers libèrent accidentellement Barnabas de sa prison et il découvre une société profondément changée. De plus, son entreprise familiale comme sa vieille demeure de Collinwood sont tombée en ruines au profit d'une autre société dirigée par... Angélique Bouchard ! Barnabas fait donc la connaissance des quelques membres de sa famille qui vivent à Collinwood pour redorer le blason de la famille Collins tout en déjouant les plans d'Angélique qui menace de tuer sa famille s'il continue de refuser ses avances.
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Inspiré d'une série télévisée américaine mythique, Dark Shadows était un prétexte tout trouvé pour un retour à la réalisation de Burton. Le film jouissait instantanément de la popularité de la série et l'histoire, parsemée de monstres et autres châteaux en ruines, sied formidablement bien à son metteur en scène. Une véritable aubaine pour les producteurs avides de films commerciaux qui rapportent gros ! En perte de vitesse depuis quelques années, on peine à retrouver le grand metteur en scène qui nous a pourtant offert assez récemment Big Fish ou Sweeney Todd. Mais il semblerait que plus Burton s'enfonce dans une certaine routine cinématographique de moins en moins captivante, et j'en veux pour preuve le très décevant Alice aux pays des merveilles, plus le succès commercial qui s'en suit s'avère important ! Curieusement, cette perte de qualité indéniable qui caractérise ses films sortis au cours des années 2000, à quelques exceptions près, va de pair avec un accroissement considérable de la popularité du metteur en scène. Ainsi, chacune de ses nouvelles productions sont attendues partout dans le monde avec une certaine ferveur.
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Ce n'est pourtant pas au meilleur moment de sa carrière que l'on s'intéresse le plus au réalisateur quand on sait le peu de succès rencontré par son excellent Ed Wood sorti en 1994 et l'immense triomphe des aventures d'Alice au box-office. Certainement moins indigeste que ces dernières, Dark Shadows n'en reste pas moins dans cette continuité. Un film formaté pour plaire au grand public. Cependant, il serait bien dommage de dénigrer cette œuvre mineure dans la filmographie du réalisateur car elle dispose d'atouts évidents pour s'imposer dans le cœur du public. L'ensemble, bien que dispensable et pas foncièrement inoubliable, demeure assez divertissant. Et n'est-ce pas là ce que l'on est en droit d'attendre en priorité lorsqu'on regarde un film ? Le comique de situation qui place Johnny Depp dans des conditions souvent inadaptés à son statut de vampire du XVIIIème siècle est parfois remarquablement drôle, et rappellera aux spectateurs français que nous sommes quelques scènes bien connues des Visiteurs de Jean-Marie Poiré (cf. la découverte d'une route goudronnée par Barnabas Collins, ou sa réaction face à la télévision).
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Beaucoup considèrent que Burton est, et a toujours été, bien meilleur pour créer l'atmosphère visuelle d'un film que pour le réaliser. Ici encore, la réalisation est simple, efficace mais sans aucune véritable virtuosité. On pourrait d'ailleurs faire le même reproche à ce qui concerne le montage du film bien qu'on sente très rapidement que beaucoup d'efforts ont été mis en œuvre pour tout ce qui se rapporte au montage sonore. Les musiques sont souvent insérés au moment opportun pour créer des décalages assez amusants entre ces musiques et ce que l'on voit à l'écran. En revanche, le montage cinématographique (j’entends par là, la mise en relation des images et des scènes entres elles) est terriblement linéaire et sans aucune originalité. Pire, certaines séquences s'enchaînent assez bizarrement et parfois, les plus observateurs se surprendront à se demander si l'ordre dans lequel les certaines scènes sont montées ont un véritable sens artistique ! En bref, rien de bien extraordinaire concernant la réalisation, acceptable mais sans fantaisie.
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Difficile de trouver une association Burton-Depp qui n'ait pas fait mouche. Presque logiquement, Johnny Depp incarne à la perfection le dandy vampire au dialecte un tant soi peu dépassé. Maniéré et plein de mimiques, comme il le fait si bien depuis qu'il a joué Jack Sparrow dans la saga bien connue, c'est avec beaucoup d'aisance qu'il nous campe LE personnage véritablement charismatique du film. Cependant, n'allez pas croire une seule seconde que Depp puisse faire de l'ombre à qui que ce soit dans ce film. Les autres acteurs et actrices s'en tirent ici à merveille. A commencer par Eva Green, sublime sorcière aussi sexy que cruelle, qui illumine le film par sa féminité machiavélique . Les autres actrices ne sont pas en reste. Quel plaisir de retrouver une Michelle Pfeiffer pleine de classe, qui avait quelque peu déserté les écrans depuis un certain temps, et que l'on retrouve particulièrement à l'aise dans le rôle de la maîtresse de maison et dirigeante de la famille Collins. Hélena Bonham Carter assure aussi avec qualité son rôle de doctoresse, incontestablement porté sur la bouteille et un brin dépressive, mais c'est bien Jackie Earle Haley qui surprend agréablement en interprétant avec beaucoup de talent le majordome de la famille Collins, véritable atout comique du film.
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Encore une fois, Tim Burton nous gratifie d'une ambiance visuelle extrêmement travaillée. On retrouve avec beaucoup de plaisir cette atmosphère chère au réalisateur qui a fait son succès et fascine encore aujourd'hui après ce quinzième long-métrage marqué de la patte de Burton. Évidemment l'histoire, mettant en scène vampires et sorcières, est une bien belle occasion de plonger le spectateur dans des décors gothiques, dont le parfait exemple n'est autre que le château de la famille Collins, impressionnant par le soin apporté aux détails. Mais c'est comme toujours en jouant sur les lumières, ou plutôt sur les ombres et les décors sinistres qu'il nous transporte encore une fois dans son univers. Certaines images sont d'ailleurs particulièrement belles sur le plan esthétique. Les maquillages et costumes que l'on affuble à un Johnny Depp passablement transformé sont un parfait alliage de froideur et de mélancolie agrémenté d'un zeste de ridicule qui contraste bien évidemment avec le caractère délibérément sérieux du personnage. Pour résumer, Tim Burton fait du Tim Burton avec beaucoup d’expérience et de sincérité tout en sachant exactement ce que l'on attend de lui sur l'aspect visuel de son film. La critique comme le public ne manquera pas encore une fois de le féliciter.
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Personnages marginaux, extrême pâleur sur les visages (qui se justifie pour le cas du vampire Barnabas), aucun doute c'est bien du Tim Burton ! Malheureusement, ce coup-ci, l'intrigue est relativement plate. Pire encore, elle s'éparpille un peu partout à la manière d'une série télévisée qui aurait encore des dizaines d'épisodes pour présenter un dénouement digne de ce nom à chacune des petites trames scénaristiques développés dans la première partie de la série. Sauf qu'ici, l'équipe du film ne dispose que d'un peu moins de deux heures. On assiste alors à des explications de dernière minute voire même à l'abandon de toute idée de développement de certains pans de l'histoire. Les personnages sont à peine esquissés et très peu d'information filtre sur leur passé ou leurs motivations. Vicky (Bella Heathcote), sorte de réincarnation de l'amour perdu de Barnabas, est un bel exemple de personnage raté, apparaissant très souvent au moment inopportun, comme pour compenser le manque de profondeur du scénario en alimentant une histoire d'amour dont on connaît tout dès la première seconde. En ce qui concerne l'humour, véritables baromètre d'une comédie populaire, les jeux de mots sont nombreux et les répliques font souvent mouches. Mais, au final, on sourit bien plus qu'on ne rit à gorge déployée même si certains passages, trop rares, restent vraiment drôles.
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La B.O. du film a largement été louée par les critiques lors de sa sortie en salles. Il faut dire que les musiques qui ont été réutilisé sont toutes des standards des années 1960-1970 et des monuments de la musique pop. « Nights in White Satin » de Moody Blues, « Top of the world » des Carpenters et bien d'autres morceaux sont utilisés, souvent de façon décalé, pour asseoir l'atmosphère seventies. Certaines musiques sont d'ailleurs réellement bien introduites, on pensera notamment au morceau culte « You're the first, you're the last, my everything !» de Barry White qui ponctue avec beaucoup d'humour une scène d'amour torride (et violente !) entre Barnabas et la sorcière. Cependant, c'est avec une certaine déception que l'on constate finalement que les musiques originales, composées par l'incontournable Danny Elfman, sont bien loin d'être mémorables. C'est bien simple, impossible de se rappeler la moindre musique qui nous ait véritablement marqué après le visionnage du film, hormis bien sûr les chansons déjà existantes dont nous parlions précédemment. Le travail de Elfman se limite donc à quelques musiques d'ambiance, assez mystérieuses, bien loin des thèmes envoûtants composés pour Edward aux mains d'argent ou même Spider-Man. Dommage que le film n'ait pas su lier les musiques connues des années 1970 à un vrai travail sur des œuvres originales ! On notera enfin la présence du rockeur Alice Cooper, comme un énième clin d’œil à cette époque revisitée.
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13/20
Peut-être que le statut de mythe du cinéma contemporain que Burton acquiert un peu plus à chacun de ses films nous rend trop exigeant. Toujours est-il que Dark Shadows n'est clairement pas l’œuvre la plus mémorable de son réalisateur. Loin d'être dénué de qualité, le film pop-corn à la sauce Burton est souvent amusant, jamais déplaisant. Que dire aussi de l'interprétation réussie de ses acteurs fétiches ou même des nouveaux venus et de l'ambiance visuelle toujours aussi enchanteresse ? Cependant, il manque quelque chose, ce petit plus qui ferait qu'au lieu de n'être qu'un simple bon film, ce soit une œuvre marquante dans sa filmographie. A conseiller pour passer un bon moment, sans prétention.
Publiée le 27 octobre 2012 à 20:08:30 par Kevin Sigayret
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